Les voies de la résilience et de la transformation numérique dans le secteur de l’eau
En bref
La COVID-19 nous a appris que le monde est plus sensible que jamais aux menaces mondiales. L’industrie de l’eau ne fait pas exception. Les anciens modèles commerciaux et les règles de base de l’industrie sont en train de changer en raison des pénuries, des changements climatiques, du vieillissement des infrastructures et de l’évolution démographique
Une nouvelle étude sur les risques liés à l’eau dans le monde, Aquanomics, a révélé des défis importants en matière de disponibilité, de qualité et de sécurité de l’eau, et souligne l’urgence d’un changement. Le nombre de tempêtes, de sécheresses, d’inondations et de feux de forêt est en augmentation, et Aquanomics prévoit que les conséquences économiques de ces événements pourraient entraîner des pertes totales de près de 5,6 T$ US pour le PIB américain d’ici 2050.
Aquanomics plaide en faveur de repenser la résilience de l’eau et la manière dont nous pouvons nous préparer à un avenir incertain. Il est temps de reconnaître l’importance de l’eau en tant que cycle naturel équilibré et de maximiser les avantages de sa circularité inhérente. Pour l’industrie de l’eau, qui est responsable de l’approvisionnement, de la qualité, de la collecte et du traitement de l’eau, cela signifie qu’il faut se concentrer sur l’innovation et encourager une approche collaborative pour transformer les réseaux d’eau à l’échelle mondiale.
Construire pour la résilience signifie que nous ne pouvons plus compter sur la mise en œuvre d’interventions coûteuses à grande échelle. Nous devons plutôt adopter une vision stratégique à long terme de la gestion des ressources, axée sur trois principes clés :
- S’adapter.
Intégrer la résilience future aux nouveaux projets. L’industrie doit s’adapter rapidement aux risques à mesure qu’ils évoluent. Un modèle de gestion adaptative faisant appel à des investissements plus petits et même temporaires (sur des horizons de 10 et 20 ans) permettra une plus grande souplesse.
- Optimiser.
Améliorer le rendement de l’infrastructure existante grâce à des technologies de pointe et à des données probantes.
- Prioriser.
Il faudra donner la priorité aux solutions régénératrices et respectueuses de l’environnement. L’économie circulaire sera essentielle à la gestion de l’eau. Il faudra également mettre l’accent sur le recyclage de l’eau et la récupération des ressources, en respectant le cycle naturel, pour améliorer la durabilité à long terme.
Investir dans la transformation numérique – et culturelle
De nombreux chefs de file dans l’industrie de l’eau reconnaissent la nécessité d’une transformation numérique pour aider à optimiser les résultats, à comprendre où à quel niveau les systèmes ne parviennent pas à répondre aux besoins changeants, et à planifier de meilleurs investissements pour l’avenir. Si la technologie est disponible aujourd’hui, un défi à plus long terme est la nécessité d’un changement culturel afin de véritablement réussir – il faut un changement complet des mentalités pour innover et résoudre des problèmes complexes. Comment les décideurs peuvent-ils créer et entretenir le leadership et les changements culturels nécessaires à cette transformation?
- Un besoin urgent d’avoir plus de chefs de file du numérique
Le leadership numérique est devenu la nouvelle aptitude attendue des chefs d’entreprise à mesure que le rôle traditionnel des dirigeants évolue. Les dirigeants doivent comprendre les tendances externes, aider les organisations à imaginer un avenir numérique, sensibiliser leur entourage, réorienter l’expertise technique et utiliser la pensée agile pour favoriser l’innovation. Les chefs d’entreprise d’aujourd’hui doivent être férus de numérique et comprendre comment mettre sur pied et diriger des équipes, maintenir les gens connectés et engagés, et favoriser une culture d’apprentissage et d’amélioration continue.
Plusieurs associations de l’industrie de l’eau aux États-Unis ont créé des cadres pour préparer les futurs chefs de file en eau. Cependant, trop peu d’organisations se consacrent à développer leurs propres chefs de file du numérique. Au lieu de cela, elles s’appuient sur le modèle traditionnel de la retraite et de la relève.
- Changer de mentalité en passant de l’efficacité opérationnelle à la création de valeur
Les entreprises de l’industrie de l’eau ont passé des décennies à intégrer une mentalité d’« efficacité opérationnelle » dans leurs organisations. Jusqu’aux récents bouleversements numériques, elles ont peu réfléchi à l’autre côté de la médaille de la productivité : la création de valeur pour les clients. L’innovation va à contre-courant dans de nombreuses organisations, car elle est en concurrence avec les principes de gestion traditionnels.
Après la crise de la COVID-19, la réduction des coûts et l’efficacité opérationnelle sont devenues vitales pour les organisations qui tentaient de se remettre de leurs revers financiers. Les investissements numériques sont devenus centrés sur l’automatisation des processus et la réduction des coûts. L’amélioration du service et de l’expérience client étaient rarement au centre de ces initiatives.
Aujourd’hui, les clients s’attendent à des interactions personnalisées et très pertinentes, adaptées à leur contexte individuel. Dans un contexte d’incertitude croissante, les chefs de file du numérique doivent redoubler d’efforts pour satisfaire les clients.
Au cours de la dernière décennie, les organisations du secteur de l’eau en Australie sont passées d’une approche axée sur les actifs à une approche axée sur les clients. Les États-Unis sont eux aussi en train de prendre ce virage, car les données révèlent que les clients ont toujours le choix, même s’il s’agit d’acheter de l’eau en bouteille à un prix 400 fois supérieur à celui de l’eau publique.
- Construire des systèmes flexibles et agiles pour faire face à des conditions qui évoluent rapidement
Les dirigeants doivent laisser de côté la mentalité de « forteresse » et adopter des infrastructures et des systèmes flexibles et agiles. Les idées nouvelles ne sont que le point de départ; les organisations doivent saisir les occasions émergentes plutôt que d’allouer des ressources à une planification financière statique qui entrave l’innovation.
Les organisations créent des cadres qui s’appuient sur l’analytique et l’apprentissage automatique pour évaluer les projets en fonction du profil risque/rendement. En déterminant les occasions qui offrent un meilleur rendement, nous pouvons renforcer les résultats et assurer la stabilité financière.
- Créer des écosystèmes pour une collaboration mondiale et locale
Les dirigeants ont naturellement tendance à être réticents à partager les talents et les connaissances opérationnelles, ou à regarder au-delà des frontières de leur organisation. Cela vient entraver la collaboration; une pénalité considérable à un moment où les industries traditionnelles devraient s’associer à des acteurs qui comprennent le pouvoir croissant des clients.
Pour profiter de la vague de changement dans le secteur de l’eau, il faut s’engager dans un écosystème plus large. Il est temps d’embrasser le changement : il faut rechercher des collaborations, des partenariats et des investissements minoritaires auprès d’entreprises en démarrage et d’acteurs innovants issus de nouveaux créneaux, et amener les organisations en territoire inconnu.
- Communiquer efficacement la valeur des nouvelles approches
Nous avons besoin de dirigeants capables de guider leurs organisations à travers les perturbations, en mettant en lumière la valeur de la flexibilité, plutôt que de résister aux réalités actuelles liées au climat ou de les ignorer. Le potentiel de la gestion intelligente des actifs au profit des organisations et des communautés concernées est énorme. Mais comment communiquer avec élégance les répercussions potentielles de la transformation numérique? Les dirigeants qui expliquent efficacement la proposition de valeur obtiendront la meilleure adhésion et le meilleur rendement de l’investissement à mesure qu’ils innovent.
Pour tirer parti des solutions disponibles et prévenir de graves conséquences financières, les chefs de file dans le secteur de l’eau doivent aborder le changement à tous les niveaux de la gestion des systèmes. Le secteur de l’eau peut se projeter dans une nouvelle réalité où l’agilité est la nouvelle norme, où l’expérience humaine est au cœur des préoccupations, où la technologie et les données sont les catalyseurs, et où la certitude de la valeur est le résultat.
Le changement perpétuel est là pour rester, et les meilleurs dirigeants sont ceux qui vont non seulement l’adopter, mais aussi le catalyser.