Atténuer minutieusement les risques dans un plan de transition de parc automobile

Auteur et autrice : Rippan Bhattacharjee
Camions blancs sur la route

En bref

Le Canada consomme quotidiennement plus de 2 282 000 barils de pétrole, produisant ainsi jusqu’à 1,1 milliard de kilogrammes d’émissions de CO2. L’un des plus grands consommateurs de pétrole est le transport, qui est responsable d’au moins un tiers des émissions totales de carbone.

L’un des meilleurs moyens de réduire les émissions de carbone dans les transports est de passer aux véhicules à émission zéro (VEZ) alimentés par des batteries électriques ou des piles à hydrogène.
Le Canada consomme quotidiennement plus de 2 282 000 barils de pétrole, produisant ainsi jusqu’à 1,1 milliard de kilogrammes d’émissions de CO2. L’un des plus grands consommateurs de pétrole est le transport, qui est responsable d’au moins unL’un des meilleurs moyens de réduire les émissions de carbone dans les transports est de passer aux véhicules à émission zéro (VEZ) alimentés par des batteries électriques ou des piles à hydrogène. Les avantages environnementaux des VEZ sont incontestables. Comparativement aux véhicules à carburant fossile, ils permettent d’éviter plus de 200 livres de polluants atmosphériques et 120 tonnes de CO2 par année et par véhicule.

Cependant, la conversion aux VEZ est un processus perturbateur, long et risqué qui peut toucher tous les aspects de notre mode de vie et de nos interactions avec nos villes. Les cinq risques que nous percevons comme les plus grands défis à la décarbonisation sont les suivants : tiers des émissions totales de carbone.
Risques financiers

En comparaison avec les actifs à combustibles fossiles, les VEZ peuvent être chers à l’achat, mais moins chers à l’exploitation, ce qui représente un obstacle financier et opérationnel important pour toute organisation souhaitant se convertir à un parc automobile propre. Pour abaisser le coût initial des VEZ à un niveau acceptable, les exploitants de parcs automobiles doivent bien comprendre les dépenses en capital (CAPEX) et les dépenses d’exploitation (OPEX) que cette transition impliquera. La présentation des dépenses sur une base annuelle devrait permettre de définir les hauts et les bas de l’investissement en capital. Par conséquent, le plan de mise en œuvre assurerait que la structure de financement soit à la hauteur des investissements requis. Ces analyses permettraient également de demander des subventions, des rabais et des prêts du gouvernement, réduisant ainsi la pression du CAPEX sur le parc de véhicules. Il est naturel d’approcher ces importants investissements en capital avec prudence. Chaque parc a donc besoin d’un plan de déploiement des VEZ réaliste et défendable, pouvant être communiqué efficacement aux principaux intervenants.

Risques liés aux infrastructures
Les VEZ ont besoin d’infrastructures de recharge et d’entretien spécialisées, ce qui pourrait nécessiter une modernisation complète des infrastructures existantes. Par exemple, les îlots de ravitaillement existants deviendraient obsolètes, ce qui permettrait de réaffecter le terrain à de nouvelles solutions comme des stations de recharge de VE ou des postes de ravitaillement en H2. Cela représente un défi sur le plan des dépenses en capital et des nouvelles normes de conception et de construction. De plus, les exploitants de parcs automobiles devront veiller à ce que toutes ces nouvelles infrastructures soient construites dans le respect des limites budgétaires et des normes locales en vigueur. Les protocoles de sécurité devront également être mis à jour, car l’électricité et l’hydrogène peuvent être dangereux dans certaines situations. 
Risques technologiques
Il existe aujourd’hui sur le marché de nombreuses technologies à zéro émission qui ne cessent de se développer et de s’améliorer. La technologie électrique à batterie s’est imposée comme la référence pour les véhicules légers, mais elle peine à répondre aux besoins des véhicules qui nécessitent une longue autonomie et une forte puissance, comme les camions de transport de marchandises et les autobus. L’hydrogène est une excellente option de rechange aux véhicules électriques à batterie, mais il reste du chemin à parcourir avant que cette technologie atteigne sa pleine viabilité commerciale. Pour un parc automobile, se tromper dans ce choix peut avoir des conséquences dramatiques à long terme, tant d’un point de vue financier qu’opérationnel. Le pire scénario serait qu’après le déploiement, il faille faire marche arrière et adopter une autre technologie en raison de problèmes imprévus d’exploitation et d’entretien de la technologie propre choisie.

Les simulations de véhicules jouent un rôle clé pour atténuer ce risque. Les exploitants de parcs automobiles peuvent utiliser la télématique des véhicules (GPS) pour simuler le rendement d’un futur VEZ selon toutes les variables routières possibles, comme les feux d’arrêt, la météo locale, la congestion routière, l’achalandage, les charges accessoires, le système de chauffage, ventilation et conditionnement d’air (CVCA), la topographie de la route et les détours potentiels. Les simulations peuvent déterminer automatiquement la composition et la trajectoire idéales pour répondre aux exigences opérationnelles du parc automobile.
Risques opérationnels
Les VEZ et les véhicules à carburant fossile ont des besoins opérationnels très différents. Les entreprises ont passé des décennies à optimiser leurs parcs de véhicules au diesel, à essence ou au gaz naturel comprimé (GNC). Le cadre opérationnel existant n’est peut-être pas l’approche optimale pour un parc automobile composé à 100 % de VEZ. La transition d’un parc automobile exige un examen approfondi des attentes en matière d’entretien du parc existant en tenant compte des possibilités de recharge et de ravitaillement, et d’atténuer l’autonomie potentiellement limitée des VEZ. Un examen global du cycle de conduite et d’utilisation des véhicules actuels permettrait aux exploitants d’adapter leur parc et leur entretien aux VEZ et de s’assurer que les véhicules répondent bien aux exigences. Cela contribuera également à atténuer l’anxiété de l’autonomie qu’un exploitant de parc automobile pourrait éprouver à l’égard des VEZ 
Risques énergétiques
À l’heure actuelle, les produits pétroliers constituent la principale source d’énergie pour les transports. La chaîne d’approvisionnement de ces produits est établie depuis plus de 100 ans et est raisonnablement prévisible. Une transition vers l’énergie propre rendrait cette chaîne d’approvisionnement obsolète et mènerait vers une nouvelle chaîne d’approvisionnement pour acheminer l’énergie renouvelable, comme l’électricité ou l’hydrogène, de la source au client. La stabilité de cette chaîne sera remise en question à mesure que la transition vers les VEZ s’accélérera et augmentera la pression sur l’approvisionnement. Cela pourrait causer des pannes d’électricité ou des baisses de tension, ce qui entraînerait un service peu fiable et entraverait gravement la fonctionnalité du parc automobile. Les parcs automobiles peuvent toutefois atténuer ce risque en prévoyant leurs besoins énergétiques pour un parc constitué à 100 % de VEZ et en parlant directement à leur fournisseur de services publics local. Cela aide à assurer que l’infrastructure des services publics est planifiée et suffisamment résiliente pour répondre à la demande éventuelle. Les exploitants de parcs automobiles peuvent aussi investir dans leur propre création d’énergie au moyen de miniréseaux utilisant des panneaux solaires ou d’autres moyens renouvelables. 

Les administrations gouvernementales du Canada sont déterminées à abandonner les combustibles fossiles au profit de sources d’énergie plus renouvelable et plus propre afin de compenser les effets sociaux, environnementaux et sanitaires néfastes d’une forte empreinte carbone. Les nombreux incitatifs, avantages et rabais mis en place par les gouvernements fédéral et provinciaux en sont la preuve. La technologie elle-même évolue à un rythme rapide et rend plus facile la possession et l’utilisation d’un VEZ. Le transport carboneutre est inévitable, et chaque exploitant de parc automobile au Canada et dans le monde doit commencer à évaluer ses options en fonction de ces cinq risques. En analysant leurs parcs automobiles et leurs services et en atténuant les risques, ils pourront avoir confiance en leurs choix sur la voie d’un avenir plus propre. 

Rippan Bhattacharjee présentera une conférence intitulée Changing Ways of Fleet Decarbonization (approches adaptées pour la décarbonisation des parcs automobiles) lors du congrès de l’Association des transports du Canada le 5 octobre prochain à 8 h 30.

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